People/Cinema - Par Mathieu Perrichet - posté le 10/02/2020

Rencontre avec l'équipe de Mine de rien

Dans un esprit de franche camaraderie, les comédiens Arnaud Ducret, Mélanie Bernier, Philippe Rebbot - également co-scénariste - et leur réalisateur Mathias Mlekuz - bien qu’un peu dissipés - se sont pliés au jeu des questions-réponses avec le sourire pour en dévoiler davantage sur la comédie sociale Mine de rien.

Quel est le point de départ de ce premier film derrière la caméra ?
Mathias Mlekuz : La vérité c’est que l’on s’est mis au travail il y a environ 10 ans déjà pour ce film avec Philippe Rebbot. C’est à ce moment là que l’idée a germé et fait son chemin. Puis la mise en production s’est faite il y a 7 ans. En fait, je viens moi-même du nord de la France et de ce milieu de la mine. Et, plus jeune, j’avais une passion pour les fêtes foraines. J’aime la féérie qui s’en dégage. Alors, un jour, quand j’ai visité une ancienne mine de charbon transformée en théâtre, une idée a commencé à prendre de l’ampleur dans ma tête : pourquoi ne pas réaliser un film sur la réhabilitation d’une ancienne mine en une fête foraine, pleine de vie, de joie, etc. Pour le décor, nous avons d’ailleurs eu une chance extraordinaire de trouver une ancienne mine très bien entretenue par d’anciens mineurs et enfants de mineurs.
Arnaud Ducret : Alors, c’est là que je me suis fait avoir car si j’ai accepté de jouer dans ce film au départ, c’est que j’ai cru que l’intrigue se déroulait à Los Angeles. Mais, en fait, c’était à Loos-en-Gohelle. Sauf que lorsque je me suis rendu compte de ma méprise, il était trop tard car j’avais déjà signé le contrat. 

Que raconte l’intrigue en quelques mots ?
Arnaud Ducret : L’histoire se déroule dans une petite commune. Mon personnage et plusieurs autres habitants sont en réinsertion professionnelle et s’apprêtent à intégrer une nouvelle entreprise. Mais, du jour au lendemain, cette société qui devait nous embaucher déménage dans un pays de l’est et on se retrouve avec plus rien. Face au fait accompli, on essaie de se retrousser les manches pour aller de l’avant.
Philippe Rebbot : Ce film parle entre autre de ce qui peut être fait dans le monde du travail à l’encontre de l’humain, au point de faire perdre toute dignité aux individus.
Mélanie Bernier : Ce sont des gens à qui ont dit soudain de partir de chez eux, d’aller trouver du travail ailleurs. Comme si c’était aussi simple qu’un claquement de doigt.

Peut-on qualifier cette comédie de militante ?
Philippe Rebbot : Sans le savoir, ce film est devenu militant. On n’est pas Ken Loach, mais il parle de notre époque et a un aspect politique par la force des choses. 
Mélanie Bernier : C’est la France d’aujourd’hui dont il est question. Celle des gilets jaunes évidemment. Cette France qui souffre et que la politique actuelle broie.
Mathias Mlekuz : Le cinéma social est un cinéma que j’aime. C’est tout un univers avec un humour davantage dans les situations. Il n’y a pas de punchline. 
Arnaud Ducret : Je pense que les comédies sociales, un peu engagées, sont de plus en plus présentes en France. 

Qu’est ce qui vous a donné envie de participer à ce film ?
Mélanie Bernier : J’aimais l’idée que ce soit un film chorale. Et mon personnage est là pour tirer vers le haut les autres. Elle a une vraie force de vie que j’admire.
Philippe Rebbot : Mon personnage aussi est dans la vie. C’est un électron libre mais ce n’est pas un mauvais bougre.
Arnaud Ducret : Ce que je regarde avant tout, avant même mon personnage, c’est l’histoire. Dans cette comédie, il y a un côté très anglo-saxon. On n’est pas dans de l’humour clinquant. Comme on l’évoquait avant, il y a un côté très social. 

En tant qu’acteur, n’avez-vous pas eu envie de jouer dans votre propre film ?
Mathias Mlekuz : J’ai adoré cette première expérience. Ecrire, réaliser, diriger. J’avais l’ambition de créer une troupe. Et j’espère avoir d’autres occasion de mettre en scène à l’avenir. En revanche, je ne me voyais pas, en plus de cela, jouer dans ce film et me diriger moi-même. C’est très difficile et je ne m’en sentais pas les épaules.

L’idée est née il y a 10 ans et la mise en production a commencé il y a 7 ans. Pourquoi cela a mis autant de temps ?
Mathias Mlekuz : Ca n’a pas été facile de boucler le budget tout simplement. Les financiers ont été frileux pour la distribution, le thème, etc. C’est pourquoi je remercie d’autant plus ceux qui ont osé se mouiller.
Arnaud Ducret : Moi, on m’a proposé le rôle il y a 6 ans déjà. Mais je n’étais pas assez bankable à l’époque, encore moins que maintenant, donc le film n’avait pas pu se faire faute de vraies têtes d’affiche.
Philippe Rebbot : Et moi j’étais même pas acteur... Enfin, je crois. De toute façon, dès le départ, on connaissait l’économie de ce film.
Mélanie Bernier : On a tellement eu un petit budget qu’avec 10 places on sera rentable, donc on n’a pas vraiment peur de se planter. C’est bien, ça enlève un poids.

Comment cela s’est passé sur le plateau avec Mathias Mlekuz ?
Philippe Rebbot : Sa direction d’acteur consistait à me dire « ta gueule ».
Arnaud Ducret : Non c’est pas vrai. Tu peux pas dire ça car ça nous fait passer pour des branleurs. On riait bien sur le tournage c’est certain, mais on était tous très sérieux et concentrés aussi quand il le fallait.

Etait-ce simple de jouer  également avec des comédiens non professionnels ?
Mélanie Bernier : Jouer avec des non professionnels apporte quelque chose de plus. C’est intéressant de voir leur crainte, leur timidité. Ca nous apportait à nous aussi. Et puis nous avons tous été non professionnel à un moment, donc ça nous ramenait un peu à nos débuts.

Quelles ont été vos sources d’inspiration pour donner vie à ce film ?
Philippe Rebbot : On s’est inspiré de l’espèce humaine, de ce qu’on connaît, des gens de la vie. On a cherché dans nos sensibilités. Puis aussi dans ce qui nous faisait marrer car ça reste une comédie. 
Mathias Mlekuz : Côté ciné, je citerais un film que j’aime beaucoup et qui m’avait marqué à 13 ans : Affreux, sales et méchants de Ettore Scola. The Full Monty m’a aussi inspiré. Tout comme To be or not to be de Ernst Lubitsch.
Philippe Rebbot : Nous avons lorgné du côté du ciné italien pour l’humanité de ses personnages.

Comment avez-vous vécu votre passage au Festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez ?
Mathias Mlekuz : L’Alpe d’Huez a évidemment été une super expérience puisque nous avons gagné le meilleur prix, celui du Public. C’est une véritable reconnaissance du travail effectué.
Philippe Rebbot : Moi je ne m’en souviens pas mais ça devait sûrement être génial. Mon frère jumeau était présent en revanche et il a bien fait la fête…
Mélanie Bernier : La rencontre avec le public a été forte. Nous avons pu voir les émotions que les gens ressentaient. Nous avons pris conscience de la dimension sensible du film à travers les spectateurs. C’est un film qui parle des Français, de notre pays et ça touche. Tout le monde peut se reconnaître et comprendre ce que vivent les personnages.
Mathias Mlekuz : C’était bouleversant de voir le public aussi ému. A fortiori alors qu’il s’agit d’une comédie.
Philippe Rebbot : En vrai, je m’en souviens un peu et ce qui m’a frappé c’est que les gens nous ont plus dit « merci » que « bravo » au final.

Avez-vous envie de rééditer l’expérience de la réalisation ?
Mathias Mlekuz : J’espère bien avoir la chance de pouvoir tourner un deuxième film c’est certain. Dans tous les cas, nous sommes déjà en train de nouveau écrire avec Philippe Rebbot.

Propos recueillis par Mathieu Perrichet

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