People/Cinema - Par Raoul Couzin - posté le 20/07/2021

Rencontre avec Sorj Chalandon et Jean-Pierre Améris

Comment vous êtes-vous rencontrés ? 

Jean-Pierre Améris : J’ai toujours apprécié les romans et le travail de Sorj et nous sommes tous les deux de Lyon. J’ai fait en sorte qu’on se rencontre, afin de pouvoir discuter d’une éventuelle adaptation de son livre.
Sorj Chalandon : Nous sommes en effet de la même région et je suivais le travail de Jean-Pierre depuis plusieurs années. A l’origine, je ne voulais pas faire adapter ce roman mais je lui ai fait confiance et le résultat est au-delà de mes espérances. 

Quelles ont été les principales difficultés pour réaliser un film sur la jeunesse d’un autre ?

Jean-Pierre Améris : L’objectif était d’adapter la jeunesse de Sorj le plus fidèlement possible. Même si certains points n’ont pas été abordés, nous avons fait en sorte d’être le plus fidèle possible à son livre. Nous avons dû prendre certaines libertés, en particulier sur le personnage de Denise, qui était dans le roman une mère qui paraissait beaucoup moins aimante. Sans ça, le récit aurait été beaucoup plus sombre et l’aspect tragique se serait fait plus ressentir.
Sorj Chalandon: J’étais présent sur la majorité du tournage, mais je me refusais d’intervenir dans la réalisation. J’ai laissé carte blanche à Jean-Pierre, tout d’abord parce qu’il était compliqué émotionnellement pour moi d’interférer sur le tournage, mais aussi car j’ai une totale confiance en Jean-Pierre et en son travail. Pour ce qui concerne Denise, à mon avis le film n’aurait pas été réalisable si son personnage avait été fidèle au livre, je ne pense pas que le film aurait pu sortir en l’état.

Jean-Pierre Améris, que vous a évoqué l’histoire d’Emile ? 

Jean-Pierre Améris : Je me suis identifié à l’histoire de Sorj. J’ai moi aussi eu un père enfermé dans ses mensonges. Je n’étais pas dans une situation aussi critique qu’Emile, mais j’ai pu retrouver des scènes de mon enfance dans son histoire. C’est pour cela que la réalisation de ce film a été intense pour moi. Nous racontions l’histoire d’Emile, mais aussi de celles et ceux qui ont vécu une enfance  tragique similaire. Cette histoire est celle de Sorj, mais j’ai su m’immiscer dans ses plis et me fondre dans ses émotions.
Sorj Chalandon : Au bout du compte, nous avons raconté la légende de nos pères (rires).

Certaines scènes peuvent être violentes, comment s’est passé le tournage pour les acteurs ? 

Jean-Pierre Améris : Benoit Poelvoorde a été excellent. Il m’a avoué qu’il a toujours voulu jouer ce rôle depuis qu’il a lu le livre de Sorj, même si son agent n’avait pas l’air emballé (rires). Il s’est parfaitement imprégné du personnage et a vraiment réussi à incarner son rôle à 100%. Pour ce qui est de Jules, il est bluffant. Qu’un si jeune acteur puisse dégager autant à l’écran est juste incroyable. Il a pris tout ceci comme un jeu, tout en donnant son maximum. Les allers-retours qu’il faisait entre le plateau et sa mère durant les différentes scènes étaient particulièrement drôles. Il avait deux personnalités, celle d’Emile devant les caméras, et celle de Jules, l’enfant « normal » avec sa mère.

Sorj, comment avez-vous vécu le fait de redonner vie à votre histoire ? 

Sorj Chalandon : Voir le film une fois terminé a été plus difficile pour moi que d’écrire le roman, je crois. Avec le talent des acteurs et le lien émotionnel que j’ai avec cette histoire, j’ai vraiment eu l’impression de revivre des passages de ma vie. Mais ça m’a fait beaucoup de bien aussi, j’ai eu le sentiment d’avoir réussi à tourner la page. L’humain est au cœur du film, avec ses défauts et ses qualités, mon histoire est tragique mais tragiquement humaine. Je pense que beaucoup peuvent s’y retrouver. Malgré toute la tristesse qu’il peut véhiculer, mon souhait le plus cher est que le spectateur puisse aussi y trouver de la joie.  

Propos recueillis par Raoul Couzin

A lire également

Profession du père
Profession du père

Sortie : 28/07/2021

Emile, 12 ans, vit dans une ville de province dans les années 1960, aux côtés de sa mère et de son père. Ce dernier est un héros pour le garçon. Et ce père va lui confier des missions dangereuses…